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Le Saint Christophe de N.-D. |
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![]() Le Saint Christophe des fonts
baptismaux de l'église Notre-Dame. -quelques photos et un texte de 1894.- En entrant dans Notre-Dame, à
droite, lorsque les yeux se sont accoutumés à la pénombre
de l'église, on distingue mal, comme sur la photo ci-contre,
sur le mur derrière les fonts baptismaux, à peine éclairée
par le vitrail des drapiers, la fresque presque noire de Saint-Christophe. |
Le premier
Bulletin publié en 1894 par La Société d'Etudes
Diverses de l' arrondissement de Louviers, ancêtre de notre SED,
contenait un article de M. Charles Dubourg, relatif à cette fresque
du géant de Notre-Dame. |
SAINT CHRISTOPHE
II
existe dans l'église Notre-Dame de Louviers,
vis-à-vis les fonds baptismaux, une vieille peinture murale, apparaissant
comme à travers un voile, et représentant un géant habillé dans
le goût du XVe siècle. L'artiste,
qui a exécuté cette décoration, a pris pour sujet la légende de
Saint Christophe.
Ce fut sans
doute aussitôt après la construction de cette partie de l'église,
c'est-à-dire vers 1500, qu'elle fut faite(1).
C'était le moment où ce saint était le plus en honneur.
Du reste,
la manière dont l'artiste a traité son sujet, indique la fin du
XVe siècle. Le saint, vêtu
d'une tunique à plis garnie de fourrure, est armé d'un bâton noueux
et tient sur sa puissante épaule l'enfant Jésus, qui appuie sur
la tête du géant le globe du monde surmonté d'une croix très longue.
Tout en haut de l'ogive, Dieu le père, au milieu d'une gloire, contemple
la scène.
M.
Barbe a signalé comme se trouvant visible encore en 1877 le portrait
des donateurs : une mère et son fils. Les armoiries étaient, autant
qu'on pouvait les contrôler, d'azur à la croix d'argent.
Nous avons remarqué
des analogies avec quelques autres fragments de peinture murale,
qui se trouvent dans plusieurs parties de l'église, et nous supposerions
volontiers que tout l'intérieur a dû être décoré vers cette époque.
Les plis du vêtement
ne sont plus drapés, comme au commencement du siècle ; ils sont
droits et sentent, pour ainsi dire, la Renaissance, dont l'aurore
se lève.
Le culte du saint
ne date, en effet, que du Moyen-Age. Sa figure, regardée par le P. Martin comme la plus
ancienne, et attribuée au XIIe
siècle, est une peinture sur verre de la cathédrale de Strasbourg,
dans le transept méridional.
Les premiers essais
connus de la gravure en relief antérieurs et précurseurs de l'imprimerie
représentent des Saints Christophe (2). Le plus ancien
est daté de 1418 et un autre de 1423.
La légende
actuelle du saint est relativement récente. Il ne s'en trouve aucune
trace, ni dans le ménologe de l'empereur Bazile, ni dans la lithurgie Hispano-Gothique, d'où il faut conclure que les monuments
écrits n'en sont pas la vraie source. Le nom du martyr et sa haute
stature fournirent aux artistes la donnée principale ; un géant
portant l'enfant Jésus, le Kristojos des Grecs, devint au Moyen-âge Christoferus
ou Christum fereus,
se trouvant par là traduit aux gens pour l'Occident comme pour
l'Orient (Documents fournis par M. Georges Rohaut de Fleury.).
Les plus célèbres
figures de ce saint datent surtout des derniers temps du Moyen-Age.
L'intention des artistes qui les exécutaient, n'était pas seulement
de rappeler la stature presque monstrueuse de Saint Christophe,
mais aussi de le rendre plus visible de loin à tous les regards.
Il paraît avoir
été reçu vers le XVe siècle,
que voir Saint Christophe, c'était une garantie contre tout accident
fâcheux durant la journée mais surtout un préservatif assuré contre
le danger de mort subite ou de rage : On disait :
Christophorum videas pastea
tutus eris.
Primitivement,
on plaçait ces colosses en dehors des églises pour qu'on puisse
les apercevoir de loin, mais lorsque, sans doute pour éviter les
dégradations, on les fit entrer dans l'intérieur des édifices, on
les mit au bas de la nef, c'est ainsi que les représentent du moins
quelques vieilles estampes assez rares
(4).
La
place qui leur fût assignée au bas de la nef, semblait assez bien
correspondre à celle d'où on était forcé de les retirer pour les
mettre à l'abri des injures du temps et surtout des hommes.
Parmi les
plus célèbres statues, il faut citer celle d'Auxerre qui datait
de 1539 et que le chapitre fit démolir en 1768, et celle de la cathédrale
de Paris qui fut condamnée par le chapitre en 1784 et qui datait
de 1413. Le premier de ces colosses avait vingt-neuf pieds de haut
et seize de largeur d'une épaule à l'autre.
Le sort des images
de saint Christophe subit à une époque un cruel revers de fortune
: « Une véritable guerre d'extermination » s'éleva contre ces curieux
vestiges d'une civilisation mal appréciée du reste par ceux qui
faisaient leur procès. Ces gigantesques figures, restées sans défenseurs,
tombèrent sous l'accusation de barbarie superstitieuse, et si leur
cause ne fut pas suffisamment instruite peut-être, il y a du moins
ceci à la décharge des juges et des destructeurs, c'est que les
peuples n'étaient plus en état de rien comprendre à ces colossales
figures. » (5)
Ce n'est pas
à dire que nous regrettions tout ce que le Moyen-Age a rêvé, pensé et surtout exécuté sans exception,
jusqu'à ces figures fantastiques et hideuses, qui le sont encore
plus depuis que nous ne savons plus ce qu'elles signifient, mais
nous regrettons les destructions, les prétendues améliorations,
les réparations maladroites et inintelligentes. Pourquoi dénaturer,
pourquoi défigurer un monument d'une époque quelle qu'elle soit
? C'est le fait de préventions, de passions en délire ou d'une ignorance
impardonnable. On doit respecter tout : vitraux, jubés, statues,
gargouilles, sculptures, peintures, ameublements, tout doit rester
à sa place et être entretenu avec une religieuse exactitude. Détruire
ou dénaturer sont deux actes de barbarie à peu près semblables,
et nous oserions presque avancer qu'il vaudrait mieux détruire que
défigurer. Les ruines n'empêchent pas de retrouver parfois tout
ou partie des formes primitives, mais un monument défiguré, dénaturé,
ne peut plus servir ni à l'étude, ni à l'histoire de l'art.
Il n'y a pas
eu de procès fait en règle contre les images de saint Christophe
pas plus que contre bien d'autres objets à nous légués par le Moyen-Age.
Ceux qui,
les premiers, mirent le marteau sur les monuments, furent des iconoclastes
furibonds qui invoquaient la religion pour tromper la multitude
ignorante et lui montraient du doigt ce qu'il fallait détruire sous
le spécieux mot de ralliement : à bas la superstition ! La raison
du plus fort fut toute l'instruction et la destruction générale
fut sérieusement méditée et arrêtée (6).
Nous ne savons
si les chanoines de l'église de Louviers connaissaient la guerre
d'extermination entreprise contre le saint, mais ils ne se préoccupaient
certes pas de conserver son image et lors du badigeonnage général
de l'église, à la fin du siècle dernier, il disparut ainsi que les
peintures polychromes dont les traces subsistent dans diverses parties
de l'église. Toutefois, grâce à la différence du procédé d'exécution,
nous devons la conservation de la peinture primitive exécutée soit
à la détrempe, soit à la cire; celle-ci était plus solide et le
badigeon s'effritant, nous laissa le saint Christophe à peu près
intact.
Pendant longtemps,
il fut caché presque entièrement par la copie de la Vierge de Foligno,
de Raphaël, aujourd'hui reléguée dans la chapelle des Chalenge.
En signalant à la
Société d'Etudes diverses, cette figure colossale, nous espérons
que longtemps encore, nous pourrons contempler ce curieux spécimen
de la peinture décorative de la fin du XVe
siècle.
ch.DUBOURG.
1 - La construction de cette partie de l'église
fut achevée en 1496. — L. Marcel
Les Rues de Louviers, page 198
2 - Vicomte Henry delaborde
(gravure).
3 - Documents fournis par M. Georges r.ohaut de fleury.
4 - Molanus,
Hilfor. imag, sacr,, page 319.
5 - Vitraux de Bourges. P.
cahier, i vol. in-fol..Notes.
6 - Guénébault. Dictionnaire
d'Iconographie religieuse, édit. par l'abbé Migue.
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